Affirmant notre souveraineté, nous reconnaissons nos frontières comme inaliénables et conformes aux cartes internationalement reconnues établies lors de notre accession à l’indépendance. Ces démarcations, notifiées à l’ONU et validées par la Cour internationale de justice ainsi que par divers accords bilatéraux, fondent notre droit et notre devoir de protection. Notre stratégie définit cinq types de frontières — terrestre, maritime, aérienne/spatiale, diplomatique et numérique — pour lesquelles nous avons élaboré des politiques spécifiques, toutes ancrées dans une vision commune portée par ce manifeste.
Une stratégie de défense tournée vers l’efficacité territoriale
La sécurité extérieure de notre nation sera garantie par une diplomatie proactive et la création d’une cellule d’intelligence stratégique. Le renseignement (extérieur et intérieur) constituera notre première ligne de défense, tandis que la protection de notre territoire sera assurée par une stratégie de défense intégrée et renouvelée. Cette dernière prévoit une transformation de notre armée, de notre garde nationale et de nos services de sécurité, suivant une approche dite multi-armes, un repositionnement stratégique de nos forces et un renforcement de nos capacités de réaction et de projection. Historiquement déployées près des villes et principalement destinées à prévenir les soulèvements populaires, elles seront désormais orientées vers la protection effective de notre territoire. Nous sortirons des accords avec l’OTAN pour nous consacrer à la mise en œuvre d’une stratégie de défense régionale, adaptée à nos réalités, à nos convictions géopolitiques et à la sincérité démontrée et effective de nos alliés.
Le Grand Maghreb élargi : une intégration fondée sur le respect des souverainetés
Dans son aspiration à l’établissement d’un Grand Maghreb élargi, notre vision de la Tunisie idéale s’engage à respecter non seulement l’intégrité territoriale de notre propre pays, mais aussi celle de chaque État membre. Cette vision promeut une union collaborative et coopérative entre les nations, préférant une collaboration mutuelle à une fusion, une modification, une dissolution des États-nations, ou une soumission à une organisation supranationale non élue qui risquerait d’effacer nos frontières géographiques, culturelles, numériques ou administratives.
Le terme Grand Maghreb élargi symbolise notre volonté commune d’intégration, basée sur le partage de valeurs, de convictions et d’aspirations communes. Cette terminologie ne limite pas notre vision d’une expansion future indépendante de la géographie traditionnelle du Maghreb, offrant ainsi la possibilité à d’autres nations — du Moyen-Orient ou du Sahel, par exemple de se rallier à cet idéal de paix, d’harmonie et de fraternité, indépendamment de leurs origines ou croyances.
La frontière comme levier d’harmonisation des flux
Notre conception de la maîtrise de nos frontières ne s’oppose pas, évidemment, à notre engagement envers une mobilité multimodale, libre, ouverte et dynamique, à l’intérieur de notre nouvel espace géopolitique. Cette mobilité concernant les personnes, les biens, les services ainsi que les capitaux se veut être le reflet d’une région composée de nations souveraines, collaboratives, interconnectées et prospères. Notre vision ne traite pas la gestion des frontières comme une barrière, mais comme un levier d’harmonisation entre mobilité et impératifs sécuritaires, identitaires, sociaux, économiques et légaux.
Cette approche vise à établir un cadre juridique clair et cohérent qui réglemente des aspects cruciaux, tels que de manière non exhaustive :
-
la nationalité et la citoyenneté ;
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la propriété, la taxation et les impôts, adaptés à la localisation du service ou de la transaction économique ;
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la gestion et la protection des données personnelles, des brevets et de la propriété intellectuelle.
Enfin, notre vision des frontières et de la mobilité régionale tient compte de la nécessité d’une application cohérente de la jurisprudence et d’une définition précise de la responsabilité légale. Notre vision est donc celle d’une Tunisie résolument tournée vers l’avenir, où la maîtrise souveraine de nos frontières coexiste avec une fluidité et une liberté de mouvement pertinente et maîtrisée, contribuant ainsi à l’édification d’un Grand Maghreb élargi intégré et à l’épanouissement des citoyens de chaque nation de notre région.
Complément Stratégique & Tactique : Une maîtrise multidimensionnelle des cinq frontières de la Tunisie grâce à une doctrine d’avant-garde pour le xxie siècle
Dans un monde où les menaces sont simultanément physiques, technologiques et hybrides, la frontière n’est plus une simple ligne sur une carte. Elle est un système opérationnel vivant, se déclinant en couches territoriales, informationnelles et stratégiques. Pour la Tunisie, ancrée dans une zone géopolitique fragile et soumise à de multiples pressions qu’elles soient migratoires, commerciales, cybernétiques ou environnementales, la maîtrise de ses frontières n’est pas seulement une priorité ; elle est le socle de sa résilience nationale et de son influence régionale.
C’est dans cette optique que notre manifeste INTILAQ 2050 propose une doctrine novatrice des « cinq frontières stratégiques » : terrestre, maritime, aérienne, numérique et spatiale. Cette approche systémique, fruit d’une analyse approfondie des dynamiques contemporaines, vise à garantir la sécurité nationale, à renforcer la capacité de réaction rapide et à ancrer la Tunisie dans les standards internationaux de la souveraineté territoriale, la positionnant comme un acteur stratégique averti et proactif.
1. La frontière terrestre – systèmes de surveillance adaptatifs et mobilité réactive : Les leçons des conflits modernes
Préambule
Pour des raisons évidentes de sécurité nationale et de confidentialité stratégique, ce document ne détaillera pas les dispositifs précis déjà opérationnels ni les stratégies & les tactiques en cours. Notre objectif est de présenter une vision d’avenir et nos recommandations tactiques pour mettre en œuvre cette vision. Ce rapport se concentre exclusivement sur les axes majeurs et les innovations conceptuelles essentielles à la compréhension de notre vision de la gestion des frontières. Il esquisse les grandes lignes de notre ambition : celle d’une Tunisie souveraine et résiliente, prête à relever les défis de demain. Ce chapitre est extrait de notre stratégie nationale qui traite l’ensemble des problématiques de restructuration de nos forces de sécurité.
Les leçons des conflits modernes
Au-delà du dispositif de surveillance déjà installé depuis 2016 à la frontière libyenne (murs, fossés, barrières électroniques), l’analyse des conflits récents, notamment la guerre en Ukraine, démontre que la maîtrise d’un territoire exige désormais une extrême mobilité des forces et une adaptabilité tactique. Les unités ukrainiennes et Russes, par exemple, ont exploité massivement des motos tout-terrain pour échapper aux drones, se repositionner rapidement ou réagir sur des terrains accidentés, illustrant une doctrine de « guérilla motorisée » face à des forces conventionnelles. Nos frontières terrestres sont vastes et complexes, propices aux trafics d’armes et d’êtres humains à travers le Sahara, aux infiltrations irrégulières par les reliefs frontaliers ouest, et aux menaces asymétriques telles que les drones FPV, les mortiers portatifs et les EEI (Engins Explosifs Improvisés).
Notre vision stratégique est de passer d’une défense de ligne à un contrôle de zone en profondeur. Il ne s’agit plus seulement de « tenir » une frontière, mais de maîtriser l’ensemble du territoire frontalier par la mobilité, le renseignement et la rapidité.
- Maillage de capteurs ISR : Nous proposons de déployer de nombreux petits capteurs discrets, comme des capteurs sismiques passifs (qui détectent les vibrations du sol causées par un passage), des ballons captifs (des ballons fixes équipés de caméras pour une vue en hauteur) et des mini-drones VTOL (des petits drones qui décollent et atterrissent à la verticale, parfaits pour la reconnaissance rapide) pour une surveillance constante. Cette infrastructure capillaire permet de couvrir les zones les plus isolées du territoire, sans dépendance à une présence humaine permanente, agissant comme des « yeux invisibles » sur le terrain.
- Unités de « Guérilla Motorisée » pour le Sahara : Nous créerons des unités spéciales d’intervention rapide, conçues pour les terrains difficiles (« off-road »). Elles seront composées de motos enduro hybrides (rapides et silencieuses), de quads électriques et de pick-up 4×4 ultralégers équipés de tourelles télécommandées (RCWS – Remote Controlled Weapon Systems), permettant d’opérer une arme à distance en toute sécurité. Elles disposeront aussi de drones suicide récupérables (des drones capables d’intercepter une cible et d’être réutilisés après une mission). Ces unités, appuyées par des drones de surveillance et des capteurs thermiques enterrés à très haute sensibilité (pour détecter la chaleur même sous terre), opéreront en coordination avec un centre de commandement régional à Tataouine, un véritable cerveau des opérations du désert, capable de regrouper et d’analyser toutes les informations en temps réel.
- Maîtrise des zones montagneuses : Pour les régions montagneuses (frontière Ouest), notre surveillance s’appuiera sur une combinaison de technologie et d’information humaine. Des drones à longue endurance cartographieront et surveilleront les zones inaccessibles. En parallèle, l’Intelligence Artificielle (IA) analysera les images des caméras de surveillance le long des axes routiers pour détecter les « signaux faibles », c’est-à-dire des comportements inhabituels ou des schémas suspects, nous alertant avant qu’une menace ne se concrétise.
- Réserves territoriales numérisées : Nous lancerons une application mobile appelée « Tunisia Safeguard » qui permettra aux habitants des zones frontalières de signaler en temps réel toute activité suspecte. Cette application garantira l’anonymat et la sécurité des communications, transformant chaque citoyen en un « œil supplémentaire » pour le renseignement humain (HUMINT), de manière sécurisée et efficace. (Cette approche était en vigueur avec Ben Ali avec 4000 citoyens engagés et a été supprimé par les gouvernements islamistes)
- Gestion pragmatique des réseaux de contrebande (« Safedeal ») : Conscients qu’une maîtrise absolue de l’ensemble de nos vastes frontières terrestres est un objectif irréaliste, nous opterons pour une approche pragmatique face aux réseaux de contrebande de proximité. Nous chercherons à établir un « Safedeal » avec ces réseaux : accepter un flux limité et raisonnable de contrebande dite de proximité, c’est-à-dire le passage de marchandises courantes destinées aux villages frontaliers. En contrepartie, il sera exigé une interdiction absolue de faire transiter des armes, de la drogue ou des combattants. Ce pacte informel, inspiré de pratiques passées (Ben Ali), permettra de concentrer nos ressources sur les menaces réelles tout en maintenant une forme de stabilité socio-économique dans ces régions sensibles. L’expérience récente a d’ailleurs montré que l’incarcération des principaux chefs de la contrebande a eu pour conséquence une multiplication incontrôlée des réseaux et une criminalisation accrue, notamment avec l’explosion du trafic de drogue et d’armes. Historiquement, dans certaines zones frontalières (par exemple, en Asie du Sud-Est où des formes de tolérance encadrée ont parfois été établies pour le commerce transfrontalier informel, distinguant les flux de subsistance des trafics majeurs), la négociation ou la gestion intelligente de ces réseaux s’est avérée plus efficace pour limiter les trafics dangereux que la répression totale sans alternative.
2. La Frontière Maritime – Sanctuariser l’Économie Bleue
Avec plus de 1400 km de côtes et une Zone Économique Exclusive (ZEE) en pleine mutation, la Tunisie est exposée à une triple vulnérabilité : les migrations irrégulières vers l’Europe, le pillage des ressources halieutiques (pêche illégale), et la vulnérabilité des infrastructures offshore (plateformes pétrolières, gazoducs, etc.).
- Marine modulaire et réactive : Nous proposons de constituer une flotte de 12 patrouilleurs rapides de nouvelle génération, des navires modernes et polyvalents, équipés de ponts compatibles avec des drones (drone-ready deck), d’un canon télécommandé de 30 mm et d’un système de propulsion hybride (moteurs thermique et électrique). Ils seront capables d’intercepter les embarcations illégales, d’assurer notre défense maritime et de maintenir une présence active le long de nos côtes et dans notre ZEE. Ces navires s’inspireront des architectures navales modulaires (conçues pour s’adapter à différentes missions) employées par des pays comme le Portugal ou la Grèce.
- Capacité sous-marine dissuasive : Nous prévoyons l’acquisition de deux sous-marins à propulsion conventionnelle (SSK) de 1 500 tonnes, équipés de modules de renseignement, surveillance et reconnaissance (ISR) ainsi que de missiles antinavire à portée côtière. Leur rôle ne sera pas offensif, mais stratégique : ils nous permettront une surveillance discrète et un recueil de renseignement vital sous l’eau. Leur simple présence potentielle (le « doute sous-marin ») oblige tout acteur naval hostile à reconsidérer ses intentions, constituant ainsi une arme de dissuasion par excellence et un verrou stratégique pour le canal de Sicile.
- Système de détection multicouche : Nous mettrons en place un vaste réseau de détection sous-marine et en surface, composé de radars OTH (Over-The-Horizon) qui peuvent détecter des cibles au-delà de l’horizon visuel, de bouées acoustiques passives (qui écoutent les sons sous l’eau sans émettre de bruit), et de drones de surface (USV) et sous-marins (UUV). Ces drones seront armés d’effets non létaux comme des harpons électromagnétiques ou des charges fluo-traceurs, permettant de marquer les navires suspects sans les endommager. Le centre MRCC (Maritime Rescue Coordination Center) de « La Goulette » sera modernisé avec des systèmes d’aide à la décision basés sur l’IA et sera triplé à « Sfax » et « Zarzis » pour une couverture et une résilience optimale.
- Jumeau numérique de la ZEE : Nous créerons une réplique virtuelle et en temps réel de notre Zone Économique Exclusive. Ce « jumeau numérique » fusionnera des données provenant des systèmes d’identification automatique des navires par satellite (AIS-satellite), des images radar (imagerie SAR), des informations météorologiques et des données sur la pêche. Cela nous donnera une vue d’ensemble complète et dynamique pour piloter les décisions de notre état-major maritime de manière plus efficace.
- Coopération renforcée : Nous établirons des partenariats solides avec l’Algérie, la Libye, Malte et l’Italie pour le partage de données de surveillance maritime et la mise en place de corridors de sécurité méditerranéens. Cette collaboration est essentielle pour des opérations conjointes de recherche et de sauvetage (Search & Rescue) et pour mutualiser nos efforts face aux défis communs.
3. La Frontière Aérienne – Bulle A2/AD Souveraine
La menace aérienne a fondamentalement changé de nature. Les incursions ne sont plus seulement le fait d’avions de chasse, mais aussi de drones COTS (Commercial Off-The-Shelf – des drones disponibles dans le commerce), de planeurs motorisés ou de munitions rôdeuses (des drones qui « rôdent » autour d’une zone avant de frapper), rendant obsolètes les architectures de défense aérienne héritées du siècle dernier. Nos radars legacy (anciens) sont peu performants en basse altitude, et la vulnérabilité des nœuds C2 (centres de commandement et de contrôle) aux saturations de signaux (trop d’informations d’un coup) est préoccupante.
- Détection avancée : Nous déploierons des radars 3D AESA (Active Electronically Scanned Array), une technologie avancée permettant de détecter de nombreuses cibles simultanément à haute précision. Ces radars seront complétés par des capteurs optiques basés sur l’IA (qui « voient » avec des caméras intelligentes), et des radars passifs réseau (qui écoutent les signaux radio ambiants plutôt que d’en émettre eux-mêmes, les rendant indétectables) pour une détection efficace même à basse altitude. Un centre de fusion des données à Bizerte centralisera toutes les informations (provenant des radars civils de l’OACA, des radars militaires de l’Armée de l’Air, et des satellites) pour créer une image aérienne unifiée et en temps réel (Single Air Picture) de notre ciel.
- Neutralisation multi-menaces : Nous mettrons en place des systèmes modernes capables de contrer les drones et autres menaces. Ces systèmes combineront des brouilleurs GNSS (pour perturber les signaux GPS des drones), des canons 35 mm airburst programmables (qui tirent des projectiles explosifs ciblant les drones à une distance programmée), des lasers de 50 kW (assez puissants pour neutraliser des cibles à distance en les brûlant) montés sur des véhicules 8×8, et des micro-ondes à balayage électronique (pour désactiver l’électronique des drones à distance).
- Commandement résilient : Nous établirons un réseau maillé JISR-TN (Joint Intelligence, Surveillance, Reconnaissance – Tunisia) bâti sur l’architecture ouverte TA-Net. Ce réseau garantira la continuité de la transmission des données vitales par satellite LEO (Low Earth Orbit) (des satellites en orbite basse) si la fibre optique au sol est coupée, assurant que nos forces gardent toujours une vision claire de la situation.
- Formation d’élite : Nous créerons une école nationale de défense aérienne à Sidi Ahmed. Cette école sera dotée de simulateurs de pointe et d’un laboratoire spécialisé dans la recherche anti-drone, afin de former des experts tunisiens capables de maîtriser cette architecture complexe et de rester à la pointe des technologies de défense aérienne.
4. La frontière numérique – Cybersouveraineté et protection des infrastructures critiques : Le bouclier de l’état moderne
Les cyberattaques ne sont plus de simples incidents techniques ; elles sont des actes d’agression ciblant des éléments vitaux comme les hôpitaux, les administrations, les banques, et même les infrastructures essentielles (réseaux d’eau, d’électricité). Nous faisons face à des menaces comme les attaques ransomware (qui bloquent des systèmes informatiques et demandent une rançon), l’exfiltration de données sensibles (vol d’informations confidentielles), et la désinformation ciblée via les réseaux sociaux.
- SOC national 24/7 : Nous renforcerons l’Agence Nationale de Cybersécurité (ANCS) en la dotant d’un Security Operations Center (SOC) national fonctionnant 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Un SOC est un centre de surveillance et de réponse aux incidents de cybersécurité. Bien que la Tunisie ait déjà mis en place des CERT publics et privés (des Computer Emergency Response Teams, c’est-à-dire des équipes d’intervention en cas d’urgence informatique chargées de prévenir, détecter et réagir aux cyberattaques), leur progression est lente et ils manquent souvent de la coordination et des moyens nécessaires pour être pleinement efficaces. Notre SOC national, lui, sera une véritable « tour de contrôle » du cyberespace tunisien. Il sera basé sur des plateformes de renseignement sur les menaces (Threat Intelligence Platforms), des outils d’orchestration de la réponse (pour automatiser certaines actions), et sera équipé d’IA XDR (Extended Detection and Response) qui permet de détecter les menaces complexes. Il inclura également une équipe « chasseuse » (hunt) offensive dont la mission est d’identifier et de neutraliser proactivement les cyberattaquants. Ce SOC aura pour rôle de centraliser et d’améliorer considérablement nos capacités de défense, et surtout, il assurera une coordination étroite avec tous les CERT existants, en définissant des méthodes de travail normalisées, en organisant des formations régulières et des exercices conjoints pour renforcer la synergie et l’efficacité collective de la cybersécurité nationale.
- Force cyber de réserve : Nous constituerons une force cyber de réserve composée de 1 000 ingénieurs civils talentueux, qui seront formés deux semaines par an et mobilisables en moins de 24 heures en cas de crise majeure. Ce vivier de compétences techniques renforcera considérablement notre capacité de réaction.
- Cyber-Range national à Kairouan : Nous créerons un Cyber-Range national à Kairouan, un « terrain d’entraînement virtuel » pour la cybersécurité. Ce pôle d’excellence permettra des exercices pratiques pour les équipes militaires et civiles, favorisant l’innovation et le développement de nouvelles stratégies de défense.
- Loi de souveraineté numérique : Forte de son expertise et des cadres déjà en place, notamment avec la Loi organique de 2004 sur la protection des données personnelles (alignée sur les standards internationaux du RGPD) et le décret-loi de 2023 sur la cybersécurité, la Tunisie élaborera une Loi de souveraineté numérique consolidée. Cette initiative ne part pas de zéro, mais capitalise sur notre savoir-faire pour renforcer et unifier l’arsenal juridique existant. Cette loi garantira une protection accrue des données personnelles de nos citoyens et la sécurité de nos infrastructures critiques. Elle encadrera les échanges d’informations transfrontaliers et, surtout, elle renforcera la protection localisée des données critiques via un cloud souverain Tunis-Gov (un centre de données sécurisé et contrôlé par l’État tunisien). Ce faisant, la Tunisie affirmera son autonomie stratégique dans le cyberespace.
- Campus Cyber Carthage : Nous mettrons en place le Campus Cyber Carthage, un centre d’excellence qui formera chaque année 200 experts hautement qualifiés en sécurité réseau, ethical hacking (test d’intrusion éthique autorisé), analyse SOC et criminalistique numérique (enquête numérique après une attaque). L’objectif est la supervision proactive de 100 % des infrastructures critiques du pays d’ici 2030, un niveau de protection essentiel pour la stabilité économique, sociale et politique.
5. La frontière spatiale – autonomie stratégique par l’orbite
Le satellite Challenge One a marqué une première étape significative, démontrant la capacité tunisienne en matière d’ingénierie spatiale. Cependant, pour le renseignement et l’analyse précis, nous dépendons encore trop de partenaires étrangers, ce qui limite notre réactivité et notre confidentialité. L’absence de veille environnementale fine et la vulnérabilité accrue de la navigation GNSS (systèmes de positionnement par satellite comme le GPS) sont aussi des préoccupations majeures.
Constellation Nationale : Nous allons au-delà de Challenge One avec le déploiement d’une constellation souveraine de 4 satellites d’observation d’ici 2030. Une constellation de satellites est un groupe de satellites qui travaillent ensemble pour couvrir une zone étendue et assurer une couverture fréquente. Cet investissement stratégique nous donnera une autonomie totale. Cette constellation sera composée de :
- 4 microsatellites optiques sub-métriques pour des images haute définition de notre territoire, avec des détails inférieurs au mètre.
- 2 microsatellites radar SAR (Synthetic Aperture Radar) capables de prendre des images de jour comme de nuit, et à travers les nuages, pour détecter les activités illicites.
- 1 satellite SIGINT (Signals Intelligence) pour le renseignement stratégique par l’écoute et l’analyse des signaux électromagnétiques.
- Cette constellation offrira une couverture nationale toutes les 90 minutes, avec une récurrence d’imagerie sans précédent pour la surveillance territoriale, la détection, le renseignement et la surveillance environnementale (anticipation des sécheresses, gestion des ressources en eau, lutte contre la désertification).
- Agence Spatiale Tunisienne : Ce programme sera piloté par une Agence Tunisienne de Coordination Spatiale, une structure interministérielle agile, associant les meilleurs ingénieurs civils et experts militaires, rattachée à un Secrétariat d’État à la souveraineté technologique. (A valider, nous étudions encore ce point pour avoir la meilleures organisation)
- Station sol Grombalia modernisée : Notre station au sol de Grombalia sera modernisée pour permettre un téléchargement rapide des données en bande X (une fréquence de communication rapide), un traitement des informations assisté par IA en quasi-temps réel, et un stockage sécurisé de ces données (un data-lake sécurisé).
- Programme universitaire « CubeSat–Tunis » : Nous lancerons un programme universitaire qui verra le lancement de trois satellites d’entraînement de type CubeSat tous les deux ans. Un CubeSat est un type de nano-satellite, petit et standardisé, idéal pour la formation et le test de nouvelles technologies. Cela permettra de former concrètement nos ingénieurs aux technologies spatiales et de tester de nouveaux capteurs en conditions réelles.
- Alliances stratégiques : Nous chercherons des alliances pour un accès réciproque aux méga constellations (réseaux de milliers de satellites comme Starlink ou OneWeb) afin de renforcer notre résilience en matière de PNT (Position, Navigation, Timing), c’est-à-dire les services de positionnement, navigation et synchronisation horaire essentiels, et d’assurer une connectivité d’urgence essentielle.
Propositions complémentaires : Vers une Souveraineté intégrée et adaptée
Pour parachever notre doctrine des « cinq frontières stratégiques » et renforcer la position de la Tunisie comme leader régional en matière de sécurité et de souveraineté, nous devons intégrer des initiatives qui capitalisent sur les technologies émergentes, la résilience humaine et une approche « gagnant-gagnant » de la coopération.
1. Commandement et Contrôle
- Centre d’opérations interarmées : Création du Joint Operations Center TUN-C2 à Tunis, qui sera le cerveau central de nos opérations de sécurité. Il sera connecté via une fibre optique dédiée et disposera d’une sauvegarde par satellite LEO (Low Earth Orbit) pour assurer une communication ininterrompue.
- Décision rapide : Développement d’une doctrine d’emploi JADC² tunisienne (Joint All-Domain Command and Control). Ce concept vise la fusion en temps réel des informations provenant de tous les domaines (terre, mer, air, cyber, espace) et une prise de décision extrêmement rapide, dans un cycle de « twenty-minute loop » (un processus continu de planification, d’exécution et d’évaluation visant une boucle de décision ultra-rapide de vingt minutes).
2. La frontière humaine et renseignement : Le capital humain au cœur de la sécurité
Au-delà des technologies, l’humain reste le premier capteur et le premier rempart.
- Académie Nationale du Renseignement Frontalier : Nous proposons la création d’une Académie Nationale du Renseignement Frontalier. Cette institution spécialisée formera les agents des différentes forces (douanes, garde nationale, armée) aux techniques avancées de renseignement humain (HUMINT) (la collecte d’informations via des sources humaines), à l’analyse comportementale, à la détection des réseaux de trafic (personnes, drogues, armes) et à la lutte contre la fraude documentaire. Elle inclura des modules sur l’intelligence culturelle et les dynamiques tribales, essentielles pour la région sud. L’objectif est de former des « officiers de renseignement frontaliers » capables de travailler en synergie et de manière proactive.
- Brigades Cynophiles Spécialisées : Un renforcement significatif des Brigades Cynophiles Spécialisées aux points de passage et sur les patrouilles offrira une capacité de détection des explosifs et stupéfiants, mais aussi une expertise en matière de combat et de surveillance. Nous utiliserons des Bergers de l’Atlas (Aïdi), une race locale réputée pour son intelligence, sa robustesse, sa loyauté et ses aptitudes naturelles à la garde et à la protection. Pour développer et adapter au mieux ces qualités à nos missions de sécurité et de défense, nous créerons des élevages spécialisés et des programmes d’entraînement dédiés. Cela garantira une intégration parfaite de cette race ancestrale dans nos dispositifs opérationnels, exploitant pleinement leur potentiel pour les patrouilles, la détection et l’intervention.
3. Innovation technologique et « Proof of Concept » : La Tunisie comme laboratoire régional
Pour une nation agile comme la Tunisie, tester et valider des solutions innovantes est un avantage compétitif.
- Zones de Test et « Bac à Sable » Technologique (Sandbox) : Nous suggérons de définir des zones spécifiques, par exemple dans le Grand Sud ou sur une portion du littoral, comme des « laboratoires vivants ». Des technologies de surveillance et d’interception innovantes (drones autonomes, capteurs connectés, IA embarquée pour l’analyse d’images) pourraient y être testées en conditions réelles, en partenariat avec des startups tunisiennes et des centres de recherche internationaux. Cette démarche accélérerait l’intégration de solutions de pointe et validerait leur efficacité avant un déploiement à grande échelle, tout en favorisant le développement de capacités « Low-Cost, High-Impact » (faible coût, fort impact) conçues et produites localement.
4. Frontière Environnementale et Climatique : Une Nouvelle Dimension de la Sécurité
Les effets du changement climatique et la raréfaction des ressources sont des facteurs croissants de déstabilisation et de migrations.
- Surveillance environnementale des frontières : Il est crucial d’utiliser nos capacités satellitaires (future constellation tunisienne) et les capteurs terrestres pour la surveillance environnementale des frontières. Cela inclut la détection des zones de désertification avancée, le suivi des ressources en eau et l’analyse des mouvements de populations liés au stress hydrique ou alimentaire dans les pays voisins. Intégrer ces données aux analyses de renseignement frontalier permettrait d’anticiper les pressions migratoires et les tensions potentielles, tout en encourageant la coopération transfrontalière sur les ressources pour transformer des sources de conflit potentielles en leviers de stabilité régionale.
5. Diplomatie digitale et cyber-influence : Renforcer notre présence sur la scène internationale
La frontière numérique s’étend aussi à la capacité d’influencer le récit et de projeter une image de stabilité.
- Cellule de Veille et de Contre-Narrative Numérique : Nous proposons la mise en place d’une Cellule de Veille et de Contre-Narrative Numérique au sein de l’ANCS (ou du ministère des Affaires Étrangères : à valider). Cette cellule serait dédiée à la veille sur les menaces hybrides et les campagnes de désinformation ciblant la Tunisie ou les régions frontalières. Elle aurait également pour mission de développer des contre-narratives (des messages opposés) pour contrer les discours extrémistes ou les fausses informations pouvant menacer la cohésion nationale ou inciter à des mouvements illicites, s’inspirant des approches de diplomatie digitale de pays comme le Canada ou la Suède.
6. Résilience Logistique (voir le chapitre résilience du manifeste)
- Dépôts stratégiques sous roche : Construction de dépôts stratégiques souterrains à Tataouine et Jebel Serj pour sécuriser nos approvisionnements essentiels, les rendant plus résistants aux attaques.
- Chaîne d’approvisionnement numérique Blockchain : Utilisation de la technologie Blockchain pour assurer une traçabilité numérique complète de nos munitions et pièces de rechange. La Blockchain est un registre numérique partagé et infalsifiable qui garantit l’authenticité et la provenance des produits, limitant ainsi la contrefaçon.
- Industrie duale : Mise en place d’incitations fiscales pour encourager l’assemblage local de drones et la production additive (fabrication par couches successives, comme l’impression 3D) de pièces critiques. Cela renforcera notre autonomie industrielle et réduira notre dépendance vis-à-vis de l’étranger.
7. Partenariats
- Accords « Over-the-Horizon Security » : Signature d’accords de sécurité avec l’Algérie, la Libye, Malte, l’Italie et la France pour le partage de données de radars OTH (Over-The-Horizon), la mise en place de corridors SAR (Search and Rescue – Recherche et Sauvetage), et la création de cellules cyber communes pour une sécurité régionale renforcée.
- Participation OTAN DIANA : Participation pilote au programme OTAN DIANA (Defence Innovation Accelerator for the North Atlantic). C’est un accélérateur d’innovation qui vise à trouver et à soutenir de nouvelles technologies pour la défense. Cela permettra de valoriser nos innovations technologiques civiles et militaires (dual-use deep-tech) sur la scène internationale et de renforcer la coopération.
8. Fonds national pour la défense et la sécurité stratégique – accélérer l’innovation tunisienne et assurer l’autonomie technologique
- Soutien à l’innovation : Pour garantir notre autonomie stratégique dans les secteurs sensibles et stimuler l’écosystème d’innovation national, nous proposons la création d’un Fonds national pour la défense et la sécurité stratégique. Ce fonds soutiendrait activement les startups tunisiennes et les centres de recherche dans les domaines critiques de la cybersécurité, des systèmes embarqués, de la robotique, des technologies d’observation (terrestres, maritimes, aériennes, spatiales) et des drones.
- Financement et pilotage : Inspiré du Fonds européen de défense (EDF) et de dispositifs similaires en Corée du Sud ou au Japon, ce mécanisme permettrait de sécuriser des briques technologiques critiques en mobilisant des financements publics ciblés, des commandes étatiques « premier client » (l’État achète en premier pour lancer la production) et des partenariats industriels. Il serait piloté par une structure interinstitutionnelle regroupant les ministères de la Défense, des Technologies, de l’Industrie et de l’Enseignement Supérieur, assurant une synergie entre les besoins opérationnels, la recherche fondamentale et le développement industriel.
Conclusion – Bâtir une frontière systémique pour une souveraineté totale et un rayonnement stratégique
Les frontières de la Tunisie, dans le paysage géopolitique complexe et dynamique du XXIe siècle, ne sont plus de simples lignes sur une carte. Elles sont devenues des écosystèmes interconnectés, des champs de bataille potentiels, mais aussi des vecteurs d’opportunités. La doctrine INTILAQ 2050 transcende la vision traditionnelle de la défense pour embrasser une approche véritablement multidimensionnelle et intégrée. En maîtrisant simultanément nos cinq frontières, terrestre, maritime, aérienne, numérique et spatiale, grâce à des technologies de pointe, une intelligence humaine affûtée et une anticipation proactive des défis, la Tunisie se dote d’une capacité inégalée à détecter, réagir et protéger son territoire et ses intérêts vitaux en temps réel. C’est une stratégie de résilience proactive, conçue pour faire face aux menaces asymétriques, aux pressions hybrides et aux enjeux climatiques qui façonnent notre ère.
Ce modèle novateur n’est pas qu’un impératif de sécurité nationale ; il est un puissant levier de transformation. Il stimule l’innovation technologique locale, crée des synergies entre les secteurs public et privé, et positionne la Tunisie comme un acteur clé et fiable sur la scène régionale et internationale. En consolidant notre souveraineté sur ces cinq piliers, nous renforçons notre capacité à agir de manière autonome, à négocier avec force et à contribuer activement à la stabilité de la Méditerranée et du Sahel.
Ce Manifeste est notre engagement envers une Tunisie forte, agile et visionnaire. C’est la promesse d’une nation non seulement capable de défendre ses acquis, mais aussi de tracer son propre chemin vers un avenir prospère et sécurisé, faisant d’elle un modèle de souveraineté intégrée pour les États agiles du XXIe siècle.
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Notre identité nationale, au cœur de notre vision souverainiste, transcende les réductions simplistes et excluantes. Nous rejetons avec vigueur les idéologies qui définissent l’identité sur des bases raciales ou qui la restreignent à la seule dimension religieuse. Par notre adhésion à ce manifeste, nous affirmons que l’identité de notre nation...

La langue au cœur de la souveraineté : Un défi pour l’unité nationale Au cœur de la souveraineté, la pleine maîtrise de la langue est essentielle pour fédérer un peuple, une nation autour d’une vision commune de son roman national, de son identité et de son avenir. Notre Tunisie, héritière...